mercredi 28 février 2007

«Le mal bureaucratique»

Je poursuis aujourd’hui avec la présentation d’un extrait du Projet de Livre blanc sur la décentralisation de 1977. Cet extrait présente les multiples facettes de ce que l’on appelait à l’époque “le mal bureaucratique”. Il est d’abord question des difficultés d’accès aux décisions. En lisant ce document qui date de près de 30 ans, on peut se demander s’il y a eu des améliorations. À vous de juger. Retour en arrière:

«Difficultés d’accès aux décisions.
Le citoyens québécois, dans la complexité et la multitude de structures, a de plus en plus de difficultés à avoir accès aux centres de décisions.

À l’intérieur du Gouvernement, les réseaux et les paliers sont multiples et complexes: le Conseil des ministres, le Conseil du trésor, la Commission de la fonction publique, plus d’une vingtaine de ministères, treize régies, neuf offices, vingt-six conseils, vingt-et-une commissions et plus de vingt sociétés d’État contrôlent des actions, préparent des politiques et des législations, appliquent des réglementations et des programmes, etc. Un bon nombre de fonctionnaires œuvrent dans les régions, les districts, les unités de gestion, les bureaux sous-régionaux, les bureaux locaux, les divisions, etc. (le vocabulaire est diversifié). Ceux-ci ont des responsabilités différentes selon les ministères et organismes, allant de la décision finale jusqu’à une simple présence sur le territoire.

Le citoyen qui rencontrera le fonctionnaire régional ou local pourra avoir également à faire plusieurs “pèlerinages” à Québec avant de trouver le bon interlocuteur pour solutionner son problème ou répondre à sa question. La situation n’est pas très différente au niveau des réseaux des affaires sociales et de l’éducation. Faut-il s’adresser au CLSC, au CRSSS ou au ministère des Affaires sociales? Le directeur de l’école secondaire dira volontiers au citoyens que c’est à cause de directives du ministère de l’Éducation que l’on ne peut régler son cas; le fonctionnaire de ministère dira aussi volontiers, et même avec éloquence, que c’est à la Commission scolaire régionale de le régler, d’où retour du citoyen dans son patelin et un deuxième rendez-vous avec son directeur, etc., etc. Le comble est que les nombreuses démarches et aller-retour ne permettront pas nécessairement de trouver une réponse à la question ou au problème posé.

Le maire de la municipalité, lui, attendra sa subvention du ministère des Affaires municipales; celui-ci attendra la décision du Conseil du Trésor; celui-là attendra la décision du ministère des Finances, qui attendra la décision du Conseil des ministres. C’est à peine une caricature.»

- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, pp. 25 et 26.

On peut noter aujourd’hui une nette amélioration dans la prise de décision de nos instances gouvernementales. Il existe beaucoup de comité que l’on appelle “horizontaux” qui regroupent des fonctionnaires de plusieurs ministères qui ont à travailler sur des dossiers particuliers. Il y a aussi les comités ministériels qui planche sur des dossiers plus large (par exemple le Comité ministériel à la décentralisation et aux régions que préside Nathalie Normandeau; le comité des priorités, etc.). De plus, le citoyens est mieux servi qu’à l’époque et peut mieux s’orienter dans les dédales de la fonction publique grâce notamment à l’Interner t à l’implantation d’un ministère comme Services Québec dont la mission est justement de répondre aux demandes des citoyens et de les orienter vers les bons interlocuteurs.

Mais, encore aujourd’hui, beaucoup de trop de décisions sont inadaptées aux besoins. Il faut remarquer aussi que les demandes qui sont faites aux gouvernements sont souvent “inadaptées” aux besoins.

«Les responsabilités perdues»

En cette période électorale où tout le monde y va de ses demandes auprès des partis qui se font la lutte, il est intéressant de faire un retour en arrière. C’est fou ce qu’on peut demander à un gouvernement sans même se poser la question si la demande que l’on fait aujourd’hui est cohérente avec celle que l’on a fait hier. On accuse les gouvernements de ne rien faire et d’être responsable de tout ce qui ne fonctionne pas; comme si c’était le gouvernement seul qui était responsable de tout et comme si nous, citoyens, syndicats ou groupes d’intérêts, etc., nous étions responsable de rien! Comme si nous avions perdu, comme individu ou collectivité, nos responsabilités.

Dans le document «Projet de Livre blanc sur la décentralisation» du 12 décembre 1977 (qui, je le rappelle n’a jamais été rendu public), on fait état de ces “responsabilités perdues” (un constat qui malheureusement est encore beaucoup actuel); mais qui, toujours selon le document, serait du en grande partie au “mal bureaucratique”. Retour en arrière:

«- il existe au Québec “une sorte de mal bureaucratique” largement répandu dans l’administration gouvernementale, dans les réseaux de l’éducation et des affaires sociales, les municipalités, les appareils syndicaux et patronaux;
- il y a une autre attitude assez généralisée chez beaucoup de citoyens qui ne savent plus qui est responsable de quoi, eux-mêmes se sentant plus ou moins responsables de rien; c’est ce qu’on pourraient appeler “les responsabilités perdues”...

Comment se manifestent ces deux sortes de maux?

1. Le mal bureaucratique:
Il est constant, il est de toutes les organisations. Il se manifeste sous plusieurs formes et, plus particulièrement par:
une difficulté de plus en plus grande pour les citoyens d’avoir accès aux décisions;
une inadaptation croissante des décisions prises par rapport aux besoins vécus localement e quotidiennement;
une segmentation et un cloisonnement des secteurs d’activités et des organisations;
une tendance à gérer les choses à partir de critères, de normes, de contrôle à priori, de vérification, de permis de toute nature et de tous les secteurs d’activités.
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, pp. 24 et 25.

2. Les responsabilités perdues:
Il s’agit d’une sorte de dérobade systématique à l’égard des responsabilités. Il y a toujours quelqu’un d’autre susceptible d’être responsable: c’est la faute du Gouvernement, du ministère, du syndicat, de la commission scolaire, de la municipalité, etc.
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, p. 30.

lundi 26 février 2007

Le transport aérien en région (suite).

Starlink aviation inaugurait ce lundi sa nouvelle liaison aérienne entre les villes de Rimouski, Rivière-du-Loup et Montréal. Une autre compagnie qui tente sa chance d’offrir un service de transport aérien en région; une aventure à haut risque. Je suis sûr que la compagnie a bien étudié le marché et qu’elle fera tout pour satisfaire sa nouvelle clientèle. Et elle y parviendra peut-être. Mais ce service sera insuffisant pour combler les besoins qu’ont les régions éloignés en transport aérien. Le marché n’est pas assez important pour rentabiliser des services adéquats. Il nous faudrait un programme comme le «Programme des services essentiels de transport aérien» que j’ai mentionné dans le message d’hier. Comment implanter un tel programme? C’est une question d’organisation. Pour assurer un service aérien suffisant dans les régions, il faudra que les régions acceptent de coopérer ensemble. Le modèle d’organisation existe déjà; il ne resterait qu’à y apporter quelques modifications.

Le modèle pour gérer la demande de services aériens dans les régions du Québec, c’est celui des organismes municipaux ou intermunicipaux de transport (OMIT) que l’on retrouve dans la région métropolitaine de Montréal. Ces organismes, appelés aussi CIT (Comité intermunicipaux de transport), planifient et organisent les services de transport en commun dans leur communauté. Contrairement aux sociétés de transport (comme la STM), ces organismes n’exploitent pas eux-mêmes le service de transport en commun, mais doivent obligatoirement traiter avec un transporteur privé ou public pour l’exploitation du service. Par contre, ce sont eux qui déterminent les horaires, trajets et tarifs qui seront offerts à leur clientèles. Une fois les besoins déterminés, ils vont en appel d’offres pour trouver un ou des transporteurs privés qui assureront le service. Ces organismes peuvent obtenir des subventions du gouvernement du Québec selon certains programmes.

Il suffirait d’instaurer un organisme interrégional de transport aérien où chaque région membre déterminerait ses besoins en matière de services aériens. Une fois déterminé les horaires, les points de services (aéroports) et les tarifs, l’organisme pourrait aller en appel d’offres. Devant une demande de services plus grande que la simple desserte d’une partie d’une région, des compagnies aériennes pourraient être intéressées à offrir leurs services ou même à former un consortium pour offrir les services demandés. Par un programme d’aide aux collectivités éloignées, les deux paliers de gouvernement (fédéral et provincial) pourraient offrir, s’il y a lieu, une aide financière pour combler les écarts entre les revenus potentiels provenant d’une banque de voyages calculés selon une étude de marché en fonction des besoins exprimés par les régions et les coûts d’opérations présentés par les transporteurs aériens dans leur soumissions.

Rappelons que, lors de l’implantation du programme américain de services essentiels de transport aérien, 555 communautés ont été désignées comme bénéficiaires. Par contre, la plupart de ces communautés n’ont pas eu besoin de subventions car elles pouvaient fournir un nombre suffisant de passagers pour rentabiliser les services. En tout, seulement 150 communautés ont eu besoins d’une aide financière du gouvernement fédéral. En permettant d’offrir un service de transport aérien de base aux régions, un tel programme permettrait aussi de soutenir de petits transporteurs régionaux comme Starlink aviation en leur assurant un potentiel de marché plus intéressant.

Le transport aérien en région.

On ne compte plus les compagnies aériennes qui se bousculent pour offrir des liaisons à prix modiques pour les grands centres urbains. Mais, pour les régions périphériques comme la Gaspésie, c’est une autre histoire. Même en les invitant, les compagnies aériennes ne sont pas très nombreuses à présenter leurs couleurs en région. Certaines communautés éloignées peuvent tirer avantage de leur isolement, comme par exemple les Îles-de-la-Madeleine, car, selon des dispositions de la loi sur les transports au Canada, Transports Canada doit soutenir financièrement des aéroports dans les localités où le transport aérien est le seul moyen de transport fiable toute l’année durant. Pour les autres communautés éloignées, des ententes comme il y a eu entre le gouvernement du Québec et Air Canada peuvent être négociées, mais ne sont pas toujours avantageuses et laisse à la compagnie aérienne le pouvoir de déterminer les horaires, tarifs et fréquences de ses services. Ce genre d’entente ne favorise pas non plus la compétition entre les différents transporteurs. Les régions périphériques dont la population peu nombreuse est dispersée sur un vaste territoire ne sont pas des marchés intéressants pour les transporteurs.

Cette problématique s’est posée aux États-Unis lors de la déréglementation du transport aérien en 1978. Les raisons invoquées pour cette déréglementation étaient que ce sont les forces du marché, plutôt qu’une réglementation gouvernementale, qui permettraient de développer des services aériens efficaces. Par contre, le Congrès américain était bien conscient que les seules lois du libre marché ne pourraient permettre de maintenir des services aériens dans les communautés moins populeuses. Il a donc lancé, au moment de la déréglementation du secteur du transport aérien en 1978, un programme de transition intitulé «Programme des services essentiels de transport aérien». Ce programme, administré par le département américain des Transports, voit à fournir des services aériens limités (en général au moyen d’avions de 19 places) à des localités qui sont à au moins 110 kilomètres d’un autre aéroport et qui ont perdu leur service aérien régulier au profit d’une plaque tournante. Le programme, qui devait être temporaire, à été étendu ces dernières années. C’est un programme qui n’est pas très coûteux car il dispose d’un budget annuel de 50 millions de dollars et dessert plus de 150 petites communautés à travers le pays.
Sources:
- La restructuration de l’industrie canadienne du transport aérien; Rapport final, Debra Ward, Observatrice indépendante de la transition de la restructuration de l’industrie du transport aérien (septembre 2002);
- The Subcommittee on Aviation Hearing on The Future of the Small Community Essential Air Service Program
http://www.house.gov/transportation/aviation/hearing/

Comment implanter un tel programme au Québec? Une question d’organisation.

jeudi 22 février 2007

Pause électorale (suite).

En période électorale, nous devrions nous abstenir de faire des demandes auprès des partis, surtout si nous n’avons rien de concret à demander. Par exemple, nous ne pouvons demander aux différents partis de s’engager à “sauver” notre chemin de fer si nous ne sommes pas prêts à faire les efforts pour le développer. Et, jusqu’à maintenant, nous n’avons pas, en Gaspésie, démontré une volonté claire de développer cet important mode de transport. Pourquoi? Peut-être parce que nous ne savons pas comment nous organiser.

Comme je le mentionnait récemment, nous sommes assez bien équipés en région en matière d’infrastructures de transport. Nous avons en effet un port de mer en eau profonde accessible à l’année (le port de Gaspé); un chemin de fer branché sur le réseau nord-américain. De plus, la proximité avec 17 États de la Côte Est américaine représentant un marché de plus de 111 millions d’habitants; et un traité de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique sont aussi des points forts. Le principal atout de notre chemin de fer est le port de Gaspé. Le principal atout pour le port de Gaspé est notre chemin de fer. Il faut donc envisager de développer ces deux modes de transport ensemble.

Comment ? On revient toujours à la même question; qui est le sujet principal de mon blogue. C’est d’abord une question politique, c’est-à-dire une question de gouvernance; gouvernance dans le sens de concertation, de gestion, d’organisation, de planification et de coordination.

J’ai déjà demandé si vous aviez des suggestions pour développer le secteur transport en Gaspésie. Mais je n’ai eu aucune réponse. Alors voilà.

Je propose une agence régionale pour le développement du transport maritime et ferroviaire pour la Gaspésie. Cette agence aurait comme responsabilité de gérer les infrastructures (ports, voies ferrées, gares, et installations connexes nécessaires au fonctionnement de ces infrastructures). Cette agence serait aussi responsable du développement de ces deux modes de transport (démarchage, promotion, études de marché, négociation de contrat, etc.). Pour que cette agence fonctionne, il faut que son conseil d’administration soit apolitique et non territorial. Le conseil doit se concentrer sur ses responsabilités: la gestion et le développement. Il ne doit en aucun cas avoir à défendre des intérêts locaux.

Je suggère donc un conseil d’administration de 5 membres composé comme suit. Un président directeur général. C’est lui qui a le dernier mot et il n’a de compte à rendre à personne. Sa seule responsabilité est de développer le transport ferroviaire et maritime en Gaspésie. Les quatre autres sièges au conseil d’administration pourraient être occupés par un représentant des élus (table des préfets, CRÉ etc.; pas nécessairement un élu); par un représentant du milieu des affaires (choisi par les Chambres de commerce); un représentant du secteur industriel; et un représentant du milieu touristique (ceci n’est qu’une suggestion). Voilà pour la suggestion. Une fois cette agence mise en place, nous pourrons sans gêne demander aux deux paliers de gouvernement l’aide dont nous avons droit. Nous aurons alors démontré notre volonté à développer cet important secteur.

Lundi, je présenterai une solution pour développer le transport aérien dans la région.

Pause électorale.

Ça y est, les élections ont été déclenchées. Qu’est-ce que les régions devraient demander aux partis? Rien. Si nous ne sommes pas prêts, en région, à prendre nos responsabilités, à déterminer nos orientations de développement et les outils dont nous avons besoins, il n’est pas nécessaire de demander rien aux partis. Nous sommes porteurs de solutions. Nos gouvernements ne peuvent que nous aider à les réaliser. Nous ne pouvons demander aux gouvernements, autant à Ottawa qu’à Québec, de trouver des solutions pour nous. Le développement de nos régions dépend d’abord et avant tout de nous. Tant que nous n’aurons pas décider ce que nous voulons au juste comme développement, et surtout tant que nous n’aurons pas décider de travailler ensemble, nous serons condamnés à attendre. Attendre quoi? Je n’en ai aucune idée. Attendre que l’on se décide à faire des demandes concrètes aux gouvernements.

Par exemple, qu’est-ce qui est le plus important lorsque l’on veut développer un territoire donné? Quels sont les secteurs qui devraient être développés en premier? Réponse: le transport et les communications.

En Gaspésie, Internet haute vitesse n’est pas encore disponible partout et nous sommes encore avec un service archaïque de téléphonie cellulaire (service analogue) alors que le Nouveau-Brunswick a le service numérique presque partout. Il y a des pays africains qui ont un réseau plus moderne que le nôtre. Pour le transport, alors que le train menace de quitter la région pour de bon, tout ce que nous avons eu comme idée, c’est d’envoyer une pétition pour dire au gouvernement fédéral que le chemin de fer était important pour notre économie. Comme si à Ottawa ils ne le savaient pas. C’est brillant comme idée. J’oubliais aussi le fonds de 100 000 $ pour étudier l’opportunité que le tronçon Matapédia - Chandler soit acheté par le milieu.

C’est pourtant pas compliqué. Un port de mer en eau profonde accessible à l’année (le port de Gaspé); un chemin de fer branché sur un réseau nord-américain; la proximité avec 17 États de la Côte Est américaine représentant un marché de plus de 111 millions d’habitants; un traité de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique. La question que nous devons nous poser est la suivante: voulons nous développer notre réseau de transport? Les gouvernements à Québec et à Ottawa attendent notre réponse et ils sont tous les deux prêts à nous accompagner. Notre réponse devrait prendre la forme d’un plan de développement de transport (et non une étude d’opportunité) et un plan de gestion global de nos réseaux (ferroviaire, maritime et aérien). Un plan à nous et non celui du MTQ.

mardi 20 février 2007

Projet de Livre blanc sur la décentralisation (1977) - suite

On poursuit avec la présentation de la dernière partie du préambule qui présente les structures régionales proposées par le gouvernement de l’époque, mais jamais rendues publiques.

«Les propositions de structures.
- Le Gouvernement propose la création de 91 comtés. Il propose également une délimitation de leur territoire et leur mode de fonctionnement ainsi que leurs fonctions et leurs sources de financement. De plus, le Gouvernement propose des ajustements significatifs aux organismes existant dans les régions métropolitaines de Montréal, Québec et l’Outaouais, qu’il s’agisse des communautés urbaines ou des organismes des réseaux scolaire et social.

- Ce palier décentralisé recevra au départ et dans le temps un certains nombre de fonctions décentralisées de différents ministères. Ces fonctions sont liées:
- à la gestion des ressources (eau, faune, forêt, agriculture);
- aux services collectifs (éducation, loisirs, culture, santé, etc.);
- à l’aménagement (équipements de transport, équipements industriels, terres agricoles, zonage);
- au développement économique et touristique.

- Ces structures pourront être mises en place à partir d’avril 1979; suivra ensuite une période de démarrage qui durera six ans, soit jusqu’en 1985.

Nous sommes conscients que cette proposition de réforme, si elle est acceptée par les citoyens, après qu’ils auront longuement été consultés, changera profondément le rôle de l’État québécois et leur redonnera un certain pouvoir sur leurs institutions et sur leur vie quotidienne. Elle modifiera également les relations institutionnelles entre l’État, les organismes décentralisés, le patronat et les syndicats.

L’appellation retenue, soit le comté, fait appel à une longue tradition au Québec. Cependant, l’organisme proposé dans ce Livre blanc est assez différent des municipalités de comté. Aussi nous interrogeons-nous sur l’opportunité de le baptiser d’un autre nom. La consultation pourrait apporter une réponse à cette question.»
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, pp. xi et xii.

On retrouve au bas de la page xii le nom en majuscule de René Lévesque. Ce document devait être signé par le premier ministre, mais il n’a pas été rendu public.

Questions.
Pourquoi ce document n’a-t-il pas été rendu public? Pourquoi le gouvernement de l’époque n’est-il pas aller de l’avant avec cette réforme?

Qui a déjà entendu parler de ce document?

lundi 19 février 2007

Projet de Livre blanc sur la décentralisation (1977) - suite

On poursuit avec la présentation du préambule.

«Redonner la responsabilité aux citoyens par une plus grande participation.
Dans l’ensemble, les citoyens québécois se sentent de moins en moins responsables par la suite de l’émiettement des pouvoirs municipaux, à cause de la présence d’institutions multiples de deux réseaux parallèles (éducation, affaires sociales et santé), à cause du cadre plus ou moins flou du développement régional où n’interviennent que des conseils régionaux de développement de nature consultative, des conférences administratives régionales sans responsabilités claires, des schémas régionaux de développement et d’aménagement sans statut précis.

Il est essentiel de favoriser une prise de conscience collective des liens entre les gestes que posent les gens. Ainsi, le syndicaliste qui négocie une convention collective doit payer lui-même la facture au bout du compte. Le parent qui réclame des services supplémentaires pour ses enfants à l’école fait de même. Les comportements des individus ne doivent donc pas rester cloisonnés.

La politique de décentralisation qui se traduira, entre autres, par la création d’organismes horizontaux politiques et administratifs sur un territoire donné, dotés de pouvoirs et de moyens financiers réels, permettra de remettre à ce nouveau palier de décision un bon nombre de responsabilités qui appartiennent actuellement au Gouvernement.

La politique de l’aménagement qui sera proposée fournira aux citoyens de nouveaux moyens appropriés pour prendre en main, selon leurs objectifs et leurs priorités, l’aménagements de leur territoire.

De même, les éléments de la politique de développement régional viendront préciser le rôle et les responsabilités d’un certain nombre d’organismes auxquels participent des corps publics, des institutions et de simples citoyens.

Par ailleurs, la décentralisation ne doit pas avoir comme effet de diluer l’action de l’État en la déchargeant de ses responsabilités fondamentales.

Le rôle de l’État québécois est de fixer le cadre général d’orientation de grandes missions gouvernementales: la mission économique, la mission sociale, la mission éducative et culturelle, la mission administrative. Ces quatre missions doivent être traduites:
- par l’orientation des politiques et la fixation du cadre législatif;
- par l’allocation des ressources financières.

Mais il dois s’assurer de l’adéquation de ces politiques aux besoins et priorités de la population. La décentralisation est une manière d’être qui peut aider fortement l’État à remplir plus justement son rôle.»
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, pp. x et xi.

C’est surprenant à quel point un document de près de 30 ans puisse être encore aussi actuel. Le constat fait sur la déresponsabilisation des citoyens et des groupes d’intérêts est encore exact aujourd’hui. Le gouvernement pourrait reprendre l’énoncé suivant, «Il est essentiel de favoriser une prise de conscience collective des liens entre les gestes que posent les gens», sans en changer une virgule et sans paraître déconnecté de la réalité. En fait, beaucoup auraient avantage à y réfléchir; surtout à l’approche des élections. Les demandes que certains adressent au gouvernement ne sont pas toujours “raisonnables”. «Les comportements des individus ne doivent donc pas rester cloisonnés».

dimanche 18 février 2007

Projet de Livre blanc sur la décentralisation (1977) - suite

Je poursuis la présentation du projet de Livre blanc sur la décentralisation datant de 1977 avec la deuxième partie du préambule.

«De 1977 à 1985: vers une décentralisation vigoureuse.»
«Deux objectifs fondamentaux sont visés par le gouvernement lorsqu’il propose de nouvelles politiques à l’égard de la décentralisation. Ces mêmes objectifs rejoignent, d’ailleurs, les préoccupations reliées à l’aménagement du territoire et au développement régional qui affectent quotidiennement les citoyens.
- Fournir un cadre approprié au dynamisme local et régional,
- Redonner la responsabilité aux citoyens par une plus grande participation.

Fournir un cadre approprié au dynamisme local et régional.
Le dynamisme de la société québécoise ne doit pas venir seulement de Québec et être situé à Québec. En ce sens, les éléments de politique concernant la décentralisation, l’aménagement du territoire et le développement régional fourniront le cadre général permettant aux divers agents œuvrant sur le territoire sur différents échelons - localités, comtés, régions administratives - d’agir en fonction de leur propre dynamisme et de ne pas devoir attendre que l’État prenne en main toutes les responsabilités. La responsabilisation des gens présuppose donc que l’État reconnaisse que d’autres que lui-même puissent faire preuve d’initiative.

La décentralisation, par le biais des structures autonomes qui sont proposées et à l’aide des moyens techniques, humains et financiers qu’elle mettra en œuvre, permettra aux citoyens de développer plus près d’eux de nouvelles activités qui sont actuellement animées, supportées et financées par l’État.

L’aménagement, par le renouvellement du processus décisionnel, par la modernisation des instruments juridiques (schémas, plans, zonage, réglementations, etc.), fournira des outils nouveaux aux collectivités pour prendre en main leur territoire.

Enfin, le développement régional, en sériant l’ordre des problèmes à résoudre, en dégageant les perspectives d’action et en organisant les forces vives du milieu régional, permettra l’émergence d’un nouveau leadership et de nouvelles activités.»
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, pp. viii et ix.

La volonté du présent gouvernement à décentraliser des pouvoirs vers les régions se heurte à l’“atrophie” de certains décideurs régionaux qui sont réticents à accueillir de nouvelles responsabilités. Elle se heurte aussi à la machine gouvernementale (autant les fonctionnaires que les politiciens) qui, pour certains, ne croient pas dans les capacités des régions à se prendre en main. L’attentisme revendicateur des régions combiné au paternalisme des gouvernements qui se sont succédés à Québec a donné lieu à beaucoup de dépenses et d’actions dont les résultats n’ont pas su durer longtemps. Certaines décisions de Québec, pourtant bien motivées, ont carrément échoué - La Gaspésia par exemple. N’ayant pas appris les leçons du passé, certains décideurs et activistes régionaux, plutôt prompts à s’armer de pancartes revendicatrices dénonçant l’inertie du gouvernement à Québec, oublient que ce sont eux qui sont porteurs de solutions.

jeudi 15 février 2007

Projet de Livre blanc sur la décentralisation (1977)

Je poursuis la présentation du préambule.

«De 1960 à 1977 - vers une centralisation certaine» (suite)
«En 1977, ce citoyen se retrouve prisonnier de normes, “otage” de multiples réseaux institutionnels et réglementé par l’État dans la plupart de ses gestes quotidiens. Certains citoyens sont de plus membres “quasi-objet” d’une centrale syndicale, travailleurs “normés” de l’Éducation ou des Affaires sociales ou fonctionnaires à vie dans l’administration publique ou para-publique. De cette façon, l’État se trouve, tous les jours, à régler toutes sortes de problèmes ponctuels: subvention pour une construction, mise en tutelle d’une municipalité ou d’une commission scolaire, vente d’un terrain d’hôpital désaffecté, fermeture d’une usine, etc. Toutes les décisions, importantes ou non, remontent à Québec. Les pèlerinages à l’Assemblée nationale, aux bureaux des ministres et de l’administration sont devenus beaucoup plus nombreux que ceux que l’on effectue à Sainte-Anne-de-Beaupré ou à lOratoire St-Joseph (et on en attend également des miracles!).»

«Cette atrophie de l’initiative, de la créativité et de la responsabilité des citoyens ne peut plus durer. Pour revivifier celles-ci, un réaménagement profond de notre vie collective est nécessaire. Le projet de décentralisation présenté ici vise à apporter des éléments de réponses à ces problèmes.»
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, p. viii.

Ce constat date d’il y a presque trente ans. Y-a-t-il eu des changements?

Lors de la signature du 2e Pacte Rural pour la région de la Gaspésie mardi, Jean-Guy Poirier, président de la Table des préfets de la Gaspésie, les Îles disait: «Il faut être prudent avant de quémander des pouvoirs et des responsabilités, il faut être certain qu'on a les moyens de les assumer».
(http://www.chautva.com/fhtm/f_nouvelle.asp?id=933)

Une assemblée publique, à laquelle 250 personnes ont participé, s'est tenue mardi à Sainte-Anne-des-Monts, dans le but de dénoncer l'inertie des gouvernements.
(http://www.radio-canada.ca/regions/gaspesie-lesiles/)

Dans le dossier éolien, la Ministre Nathalie Normandeau a déclaré qu’elle comptait sur «le leadership des MRC de la province pour arriver à un consensus sur l'acceptation sociale des projets éoliens. Les MRC sont les mieux placées pour déterminer les sites, en fonction des terres disponibles et des préoccupations du public à l'égard du paysage».
(http://www.chautva.com/fhtm/f_nouvelle.asp?id=928)

Réponse, oui et non.

Je laisse le dernier mot au Préfet de la MRC de Bonaventure, Jean-Guy Poirier : «Vous savez il y a des gens pour qui les régions, ils y croient moins que les autres (...)».

Une question de gouvernance.

On revient toujours à la même question. Que ce soit pour le développement du réseau de transport, pour le développement du secteur éolien, la question est toujours la même: comment l’organiser, le gérer. C’est une question de gouvernance. Or, pour une région comme la nôtre ou pour une région métropolitaine comme Montréal, il existe plusieurs façons de gouverner. Pendant que vous réfléchissez à la question du dernier message (comment développer le réseau de transport commercial en Gaspésie) et préparez vos suggestions, je vous présente en exclusivité le type de gouvernance régionale qu’avait imaginé le premier gouvernement du Parti québécois en 1977 dans son projet de «Livre blanc sur la décentralisation». Fait à remarquer, ce projet de Livre blanc n’a jamais été rendu public.

Pour les prochains jours, je présenterai certaines parties de ce document qui, selon moi, est encore d’actualité.

Le document que j’ai entre les mains porte l’étampe en caractères gras «PROJET» et est daté du 12 décembre 1977. Le titre est le suivant : «Livre blanc sur la décentralisation».

La table des matières se lit comme suit :

Préambule (signé par le Premier ministre)
Première partie: Les orientations
Chapitre 1: Le contexte de la décentralisation
Chapitre 2: Les objectifs
Deuxième partie: Les comtés
Chapitre 3: La structure politique proposée
Chapitre 4: Le territoire des comtés
Chapitre 5: Les compétences des comtés
Chapitre 6: Le financement
Troisième partie: Les agglomérations métropolitaines
Chapitre 7: Montréal
Chapitre 8: Québec
Chapitre 9: Outaouais
Conclusion.

Préambule.
Il n’est pas signé par le Premier ministre de l’époque, mais on retrouve bien son nom (René Lévesque) à la fin à la page xii. Le préambule comporte cinq parties. La première, «De 1960 à 1977 - vers une centralisation certaine», présente l’évolution du gouvernement central et de la société québécoise pendant cette époque. Cela débute ainsi:

«Après le célèbre “Désormais” de la fin d’une époque et le “Maître chez nous” du début d’une nouvelle époque s’est imposée aux citoyens québécois l’ère des réformes de la révolution tranquille: c’est-à-dire la prise en main par l’État d’un certain nombre de grands secteurs devenus prioritaires: l’éducation, la santé, le développement économique avec, comme corollaire, la mise sur pied d’une fonction publique québécoise. L’État, devenu agent dynamique de changement, a mis en branle un train de réformes qui ont bouleversé considérablement les habitudes du vécu quotidien des citoyens». (...)

«Au fond, cette période s’est caractérisée par un mouvement profond “d’institutionnalisation des choses”. La mise en application de normes plus ou moins rigides, plus ou moins détaillées ainsi que l’intervention financière massive de l’État ont amené la définition de nouvelles règles de jeu entre l’État, les organismes et les multiples réseaux. Un nouveau leadership politique et administratif s’est constitué à Québec et la planification est devenue à la mode. Un processus décisionnel centralisé s’est installé, processus qui a fait l’objet, occasionnellement, de tentatives timides de régionalisation, de déconcentration ou de décentralisation.»

«En somme, au cours de cette période, le citoyen québécois s’est progressivement senti pris en charge par un État réformateur, altruiste et généreux.»
- «Livre blanc sur la décentralisation» (PROJET), 12 décembre 1977, pp. vii et viii.

Intéressant. À suivre.

mercredi 14 février 2007

Aménager nos transports.

Comme je l’ai déjà écrit précédemment, nous sommes, en Gaspésie, bien équipés en infrastructures de transport; tant ferroviaires, maritimes qu’aériennes.

En voici un bref inventaire tiré du «Plan de transport de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine - 2004» du Ministère des Transports du Québec (MTQ).

Réseau ferroviaire.
D’abord, le chemin de fer. Un tronçon de 350 kilomètres de Matapédia à Gaspé qui passe par la rive sud de la péninsule gaspésienne (dans un décor enchanteur). La propriété de ce tronçon est divisée entre deux entités corporatives distinctes. D’abord, pour la portion entre Matapédia et Chandler, soit 235 kilomètres, c’est la Société des chemins de fer du Québec (SCFQ) qui en est propriétaire. Cette société a confié la gestion et la commercialisation de ce tracé à une filiale, Chemin de fer Baie-des-Chaleurs (CFBC). La portion de Chandler à Gaspé, 90 kilomètres, est la propriété de la Corporation du chemin de fer de la Gaspésie (CCFG). C’est le CFBC qui assure la gestion et l’entretien de ce tronçon.

Réseau maritime.
Le réseau des ports commerciaux du Québec comporte trois catégories: les ports nationaux, les ports complémentaires et les ports d’intérêt local. Cette classification est celle du MTQ. Le port de Gaspé appartient à la première catégorie alors que le port de Carleton-sur-mer appartient à la troisième. Le gouvernement fédéral a une classification différente. Selon Transport Canada, la région compte cinq ports commerciaux publics; soit Gaspé, Carleton-sur-mer, Paspébiac, Chandler et Cap-aux-Meules aux Îles-de-la-Madeleine. Les quatre premiers sont désignés comme des ports "régionaux-locaux" alors que le dernier est considéré comme un port “éloigné”. Tous sont exploités par Transport Canada et, fait intéressant, sont accessibles toute l’année. Il y a aussi, dans la catégorie “port régional-local”, le port de New Richmond, qui appartient à une corporation privée.

Réseau aérien.
Enfin, le secteur aérien. La région compte quatre aéroports et deux aérodromes selon le classement du MTQ. Ce classement comporte deux types de réseaux: le réseau supérieur et le réseau local. Les aéroports de Gaspé, Bonaventure, des Îles-de-la-Madeleine et de L’Île-d’Entrée font partie du réseau supérieur alors que les aérodromes de Pabok et Saint-Anne-des-Monts font partie du réseau local. Certaines de ces installations aéroportuaires sont publiques, alors que les autres sont privées. L’aéroport des Îles-de-la-Madeleine relève de Transport Canada; ceux de L’Île-d’Entrée et de Bonaventure relèvent du MTQ; l’aéroport de Gaspé est exploité par la Ville de Gaspé; l’aérodrome de Sainte-Anne-des-Monts par la Ville de Sainte-Anne-des-Monts; celui de Pabok par une régie intermunicipale appartenant à la MRC du Rocher-Percé.

Il existe d’autres installations maritimes et aéroportuaires dans la région, mais celles-ci sont plutôt d’intérêt local. C’est le réseau commercial qu’il faut développer (j’ai bien écrit “développer” et non “préserver”; c’est plus constructif).

Comment ? Avez-vous des suggestions ?

mardi 13 février 2007

Concertation, planification, coordination, partage (suite).

Je terminais mon dernier message en demandant si nous voulions relever le défi de développer notre région. Cela veut-il dire que je considère qu’il n’y a pas de développement qui se fait dans la région présentement ? En partie oui. Nous assistons à un développement que je qualifierais de morcelé; un petit morceau culturel, un petit morceau touristique, un petit morceau éducation, etc. Il y a certes du mouvement local, mais il n’y a pas de mouvement au niveau de la région. Oui il y a eu beaucoup de plans stratégique de développement d’élaborés, mais nous sommes toujours l’une des dernières régions lorsque l’on compare les progrès que nous avons fait par rapport aux autres. Pour se développer comme région, nous devons avoir une vision régionale; ce que nous n'avons pas. Quand les décideurs de Gaspé s’opposent au développement de l’aéroport de Bonaventure pour “protéger” celui de Gaspé; quand on a fait le choix de séparer le seul tronçon ferroviaire en deux (Matapédia - Chandler et Chandler - Gaspé); quand on a aidé à l’échec d’une traverse vers les Îles (de Carleton) parce qu’elle ne partait pas du bon port; on ne peut pas dire que nous avons une vision régionale.

Un démonstration, le secteur des transports. Présentement, c’est le parent pauvre de notre région. Pourtant, ce devrait être notre colonne vertébrale. L’état de santé de notre réseau de transport est à l’image de notre développement. Présentement, il n’y a aucune vision, aucun plan. Pour que l’on veuille dépenser 100 000 $ pour faire des études sur l’opportunité pour le milieu d’acheter le tronçon Matapédia - Chandler de notre seul chemin de fer, il faut vraiment être en manque d’inspiration.

Voulons nous développer notre région ? Si oui, nous devons commencer par le secteur le plus important pour notre économie : le transport. Pour ce faire, nous devrons non seulement nous concerter, mais planifier et coordonner nos actions au niveau de la région toute entière. C’est une question d’organisation, de gouvernance régionale.

Si nous parvenons à développer notre secteur transport et à le gérer régionalement, nous pourrons développer les autres secteurs de notre économie et, enfin, s’offrir le développement durable que l’on mérite (sans avoir à faire des fusions). Nous aurons compris qu’il est plus profitable de travailler ensemble que chacun dans notre petit coin.

lundi 12 février 2007

Concertation, planification, coordination, partage.

Pourquoi développer ? Pourquoi se casser la tête à vouloir plus de services, plus d’emplois, plus d’habitants, etc. ? Ne peut-on se contenter de ce que nous avons et de s’efforcer à préserver nos acquis sans en demander plus ? La réponse est NON.

Le statu quo n’est pas possible. Du moment que l’on cesse de se développer, c’est le déclin, la décroissance, la déchéance. Et c’est cela que nous devrons gérer : la décroissance. De grandes entreprises, de grandes économies, de grands empires se sont écroulés après avoir cesser de se développer. La chute de l’Empire Romain est dû en partie à l’arrêt de son expansion. Le développement constant de l’Empire lui amenait de nouvelles richesses qu’il pouvait redistribuer parmi ses sujets. L’arrêt du développement amena les autorités de Rome à lever de nouvelles taxes pour seulement maintenir les nombreux privilèges qu’elle offrait à ses légionnaires et autres nobles serviteurs afin de s’assurer de leur loyauté.

Le développement économique crée de la richesse. Cette nouvelles richesse peut être redistribuée selon les choix que nous faisons. Si on cesse de se développer, on décline. Que choisissons-nous ? Et comment organiserons-nous notre développement ? Doit-on laisser “les autres” s’occuper de nos affaires ? Doit-on prendre les choses en main ? Et comment ? En brandissant des pancartes et réclamant plus d’actions de la part des gouvernements supérieurs ? La Gaspésia, ça vous dit quelque chose ?

Nous sommes responsables de notre développement (ou de notre délabrement). Ne me dîtes pas que, par exemple, le faible achalandage de notre chemin de fer est la faute des autres ou des gouvernements de Québec et d’Ottawa; je n’y crois pas. Si le train risque de cesser de circuler dans notre région, c’est de notre faute à nous. Il est trop tard pour essayer de sauver notre chemin de fer. Il est grand temps de le développer. Je pense que l’avenir du chemin de fer en Gaspésie sera à l’image de l’avenir de la région. Pour le développer, nous devrons nous concerter, planifier et coordonner nos efforts et partager les résultats.

Le développement de notre région est notre responsabilité à tous. Voulons nous relever ce défi ?

vendredi 9 février 2007

Une question de volonté.

Le sujet de mon blogue tourne autour du développement des régions; et plus précisément du développement de la Gaspésie. Pour développer, il faut faire des gestes concrets, poser des actions, prendre des décisions. Comme je l’écrit dans le titre, c’est une question de volonté. Ça demande aussi du leadership. C’est ce qui semble manquer dans notre belle région.

Dénoncer le manque d’attention du gouvernement central ou se plaindre d’avoir été traité de façon injuste; critiquer ses politiques et programmes; revendiquer ou demander des aides et subventions; ces gestes ne démontrent pas une volonté de développement. C’est comme si on demandait que le train continu de circuler, mais que l’on est pas prêt à le prendre, à y embarquer. Remarquez que cette situation n’est pas propre à notre région. Montréal vit en ce moment le même problème.

Pour développer une ville ou une région, il faut un leadership, une vision. Le présent maire de Montréal n’en a pas. On l’entend plus se lamenter du peu d’attention que reçoit sa ville alors qu’il devrait proposer au gouvernement de participer à des projets de développement. Depuis qu’il est au pouvoir, la Ville de Montréal stagne. On se demande s’il croit dans le potentiel de sa ville. Son prédécesseur, malgré ce que disaient ses détracteurs, croyait dans le potentiel de Montréal. Et ça paraissait. Le présent maire, malgré ses grandes qualités, est un gestionnaire. Une ville, ce n’est pas une entreprise, mais un milieu de vie; peu importe sa taille. On doit la faire vibrer; faire vibrer ses citoyens; la stimuler. Pour ce faire, on ne peut se contenter de la gérer, on doit la développer. Développer, c’est croître; c’est bâtir; c’est construire. Lorsque l’on cesse de développer, on commence à gérer, à gérer la décroissance. C’est pareil pour une région. L’élu doit être un “développeur”, un visionnaire et non un gestionnaire. C’est le rôle du directeur général et de son personnel de gérer. Pas celui de l'élu.

mercredi 7 février 2007

Fusions : avantages non garantis

Premier avantage, le gouvernement du Québec, qui a juridiction sur les municipalités, peut à sa guise les faire disparaître ou le regrouper. En France, le statut des municipalités, que l’on appelle commune, est “coulé” dans la Constitution. Il s’avère donc très ardu pour nos cousins d’en réduire le nombre. Je reviendrai plus en détail sur l’organisation territoriale en France.

Deuxième avantage, le nombre de décideurs se trouve à être fortement réduit. Présentement, la Gaspésie compte un total de 303 élus pour 43 municipalités. C’est la MRC de Bonaventure qui compte le plus d’élus avec 98 (14 municipalités). Ensuite vient la MRC d’Avignon avec 77 élus (11 municipalités); la MRC de la Haute-Gaspésie avec 56 élus (8 municipalités); la MRC du Rocher-Percé avec 37 élus (5 municipalités, la Ville de Percé est la seule qui a plus de 7 élus, soit 9 au total); et la MRC de la Côte-de-Gaspé avec 35 élus (5 municipalités). Le fait d’avoir moins d’élus ne se traduira pas en économie, bien au contraire. Si on veut que les maires des 5 nouvelles municipalités soient des maires à temps plein, le total des salaires qu’ils recevront devrait dépasser la rémunération totale que touchent les élus présentement (qui est, comme je l'ai déjà écrit, famélique).

Troisième avantage. On pourrait assister à une cessation des hostilités (c’est peut-être un terme un peu fort) entre les différentes municipalités membres de chaque MRC. On ne retrouverait plus de compétitions entre les différentes municipalités qui composent présentement les MRC; plus spécifiquement entre les petites municipalités et celles de plus grande taille (par exemple le clivage entre la Ville de Gaspé et les autres municipalités de la MRC). On n’assisterait plus aux batailles rangées que se livrent les municipalités lorsqu’il est question d’accueillir de nouvelles entreprises, ou de nouvelles installations (centre des congrès, salle de spectacle, parc industriel, etc.). L’aménagement du territoire pourrait se faire de façon plus harmonieuse quant aux choix des sites à développer. Le critère des revenus de taxes ne serait plus aussi important pour choisir un emplacement pour une entreprise; du moins à l’intérieur des nouvelles villes-MRC.

On pourrait aussi s’attendre à une meilleure cohésion dans les choix qui seront faits en matière de développement. Mais ce n’est pas garanti. Rien de garanti que la région sera mieux “gérée” avec moins de décideurs et moins d’instances locales. Les guerres de clochers ne disparaîtront pas par enchantement et il y aura encore une certaine compétitivité entre les villes-MRC.

Les éléments nécessaires pour assurer un développement optimal (et durable) de notre région sont : la concertation, la planification, la coordination et le partage. Et il n’est pas nécessaire de se donner le trouble de faire disparaître quelques municipalités pour introduire ces éléments, surtout s’il n’y a pas d’économie à faire avec les fusions. C’est simplement une question de volonté.

Les fusions (suite)

Responsabilités.
Les principales responsabilités des administrations municipales sont le transport (voirie et transport en commun); la sécurité publique; l’hygiène du milieu (eau potable, eaux usées, matières résiduelles); les loisirs et la culture; l’urbanisme et la mise en valeur du territoire. Les MRC ont des compétences en matière d’aménagement et d’urbanisme et sont responsables de la préparation des rôles d’évaluation foncière. Elles sont responsables aussi de la gestion des matières résiduelles (les déchets) et du développement local, par l’entremise du CLD (Centre local de développement).

Advenant le regroupement des municipalités à l’intérieure des MRC pour en faire des villes de taille moyenne, toutes les responsabilités mentionnées plus haut reviendraient aux nouvelles villes. Elles pourraient aussi recevoir d’autres responsabilités du gouvernement du Québec dans le cadre d’une politique de décentralisation.

Fonctionnement.
Comme je l’écrivais dans le message précédent, il n’est pas question de fermer de village. Si l’on veut maintenir les régions ouvertes parce que l’on a choisi d’occuper notre territoire, nous choisissons aussi de maintenir nos villages ouverts. Avec la technologie d’aujourd’hui, nous avons les moyens de maintenir un minimum de services dans chaque communauté sans que ceux qui y vivent ne se sentent isolés. Chaque immeuble municipal et scolaire est, depuis peu, relié par la fibre optique. Avec de bons équipements, nous pourrions transformer les bureaux municipaux en guichets de services tant municipaux que gouvernementaux (guichet de Services Québec par exemple). Une collaboration entre les municipalités et les commissions scolaires pourrait permettre de compléter la gamme de services offerts aux citoyens (culture, sports, loisirs, bibliothèque, etc.).

Il est à remarquer que, contrairement aux idées reçues, le regroupement de municipalités dans une instance locale plus étendue n’a pas pour but de supposées économies d’échelle. Le but d’un tel regroupement est de permettre aux communautés locales d’offrir plus de services à leurs citoyens et de se doter d’outils et d’infrastructures pour favoriser leur propre développement économique.

lundi 5 février 2007

Les fusions : une solution simple, mais pas toujours efficace.

On peut simplifier nos structures municipales; on peut en réduire le nombre tout en réduisant le nombre d’élus et en leur donnant plus de responsabilités. Il est possible de faire des regroupements de municipalités pour avoir de villes de taille moyenne (entre 10 000 et 15 000 habitants) tout en préservant les communautés (c’est-à-dire sans fermer de village), de maintenir des services de proximité et un accès au bureau municipal pour les citoyens sans qu’ils aient à traverser le nouveau territoire municipal. Tout cela est possible.

Voici comment cela peut se réaliser (en Gaspésie) :

Division territoriale.
Nous pouvons partir d’une base territoriale déjà préétablie : la MRC. Il suffirait dans un premier temps de regrouper toutes les municipalités de chacune MRC pour en faire une seule ville; chaque MRC deviendrait aussi une ville unique (Laval, à la fois ville et MRC a ce double statut). On retrouverait sur le territoire de la Gaspésie, 5 villes-MRC : Avignon (13 310 habitants); Bonaventure (18 538 habitants); Rocher-Percé (18 928 habitants); Côte-de-Gaspé (17 822 habitants) et la Haute-Gaspésie (12 586 habitants). La municipalité des Îles-de-la-Madeleine compte 12 564 habitants. Comme on peut le constater, il y a un certain équilibre dans la répartition de la population dans chaque MRC.

Représentation.
Comme le territoire de chaque nouvelle ville se trouve à être très étendu, une division par quartier (comme la Ville de Gaspé) s’impose. Et on peut exiger que le candidat qui se présente à un poste de conseiller habite le quartier qu’il veut représenter. Combien de quartiers ? Le minimum est de six. Il s’agit de bien diviser le territoire pour que chaque ancienne municipalité soit bien représentée. On peut décider ensuite si nous voulons que le maire se dévoue à temps plein à sa tâche (ce qui serait préférable). Pour ce faire, il faudra voir à ce que la rémunération du poste de maire soit intéressante (+ de 60 000 $ par année). Il n’est pas nécessaire que les conseillers soient tous à temps plein, mais il faudra voir à ce qu’ils aient eux aussi une rémunération adéquate.

À suivre ...

L’élu : figurant ou acteur ?

La municipalité doit-elle jouer un rôle dans le développement de sa communauté ? Si vous avez répondu oui, vous vous attendez certainement que les conseillers et le maire assument leur responsabilités dans ce domaine; c’est-à-dire que vous vous attendez à ce qu’ils soient des acteurs et non des figurants. Vous vous attendez à ce que le maire ait le premier rôle et qu’il se dévoue non seulement au développement de votre communauté mais aussi à la défense de ses intérêts. Or, pourquoi payer un salaire de figurant à un acteur; et à un acteur de premier rôle ? La rémunération de nos élus en Gaspésie est famélique (en raison de la petite taille de nos municipalités).

Pour un maire d’une municipalité de moins de 5000 habitants, le salaire est d’environ 4000 $ par année; c’est un minimum. Bien sûr, une municipalité peut décider de hausser le salaire de ses élus, et même décider que le poste de maire soit rémunéré à un niveau qui pourrait intéresser certains candidats à se consacrer à temps plein à cette tâche. C’est peut-être une solution pour attirer des candidats intéressants à des postes qui sont parfois difficiles à combler. Mais ce pourrait être difficile à justifier; peut-on verser un salaire de 50 000$ à 70 000$ par année à un maire d’une municipalité de moins de 5 000 habitants ?

Plutôt que d’avoir un maire à temps plein, une municipalité peut choisir d’engager des professionnels pour assister le maire et les conseillers dans leur travail. Mais ça peut-être difficile à justifier pour des municipalités de moins de 5000 habitants. Imaginez les 43 municipalités qui engagent chacune 2 ou 3 professionnels. Ça créerait beaucoup d’emplois pour des gens comme moi, mais est-ce que ce serait utile et pratique ?

Que peut-on faire avec nos municipalités ? Et les MRC ? Y a-t-il un palier de trop ?

jeudi 1 février 2007

Des chiffres qui parlent.

On peut faire parler les chiffres, on peut les interpréter, citer ceux qui font notre affaire, omettre ceux qui nous contredisent etc. C’est pourquoi, j’ai décidé de tout les mettre. Toute les municipalités de la Gaspésie sont là (sauf ce que le MAMR appelle les territoires non organisés et les Îles-de-la-Madeleine - j’y reviendrai pour celle-ci).

Je dois donc faire attention à ce que j’avance ou j’affirme. Quand je dis que nous avons, en Gaspésie, de très petites municipalités, c’est vrai.

Comme je l’ai écrit plus tôt, la Gaspésie compte 43 municipalités : 22 ont moins de 1000 habitants; 7 ont entre 1000 et 2000 habitants; 5 entre 3000 et 5000 habitants et 3 ont plus de 5000 habitants. Selon un document du MAMR, les municipalités se préoccupent de plus en plus de développement économique sur leur territoire (2004). Est-ce souhaitable que les instances locales s’occupent de développement économique ? Je pense que oui. Nos municipalités en ont-elles les moyens ?

En regardant leur budget (voir blogue précédent), je pense que non. On peut remarquer que le poste budgétaire numéro 2 (aménagement, urbanisme et développement) n’est pas, pour la plupart des municipalités, très bien garni. L’examen de ce poste peut révéler s’il y a une volonté de développement dans la municipalité. Il faut par contre nuancer ce chiffre en tenant compte de la capacité financière (budget total de la municipalité), humaine (le poste administration générale comprend entre autres les ressources humaines et la rémunération des élus) et le potentiel de développement (l’étendu du territoire, le zonage, les installations et services existants, etc.).

Je répète la question, voulons-nous que nos municipalités jouent un plus grand rôle dans le développement de notre région. Jusqu’ici, seules celles qui ont voulu jouer un plus grand rôle l’ont fait et se sont donnés des moyens pour le faire, peu importe leur taille. Certaines municipalités décident d’offrir plus de services à leurs citoyens; d’investir dans des infrastructures (parcs industriels, aéroport, etc.); d’engager du personnel qualifié pour mieux répondre aux défis du développement. Si bien que nous avons une région développée en dents de scie et que d’autres municipalités sont tentées d’imiter les premières pour tenter de garder leur population qui commence à regarder ce qu’ont leurs voisins. Ceci risque de repartir de plus belle les guerres de clochers, les uns reprochant aux autres leur trop grande ambition. Et, pour celles qui veulent se développer, il devient de plus en plus difficile de justifier l’augmentation des budgets (et souvent les comptes de taxes qui suivent) pour un nombre aussi restreint de citoyens. Par exemple, comment expliquer que, avec une population équivalente, la Ville de New Richmond ait un budget total (4,5 millions $) deux fois plus important que ceux de Paspébiac (2,5 millions $) et Grande-Rivière (2,4 millions $).

Lundi, le rôle des élus.