mardi 24 juillet 2007

Régionalisation: déconcentration et/ou décentralisation (5)

Voici la quatrième partie du texte Les voies de la régionalisation: déconcentrer ou décentraliser l’État - Éléments de choix que j’ai rédigé en 1995. Cette partie présente les différents types de décentralisation qui peut exister.

Les types de décentralisation
Un survol de la documentation et de quelques ouvrages sur la question fait ressortir qu’il existe plusieurs types de décentralisation. Les paragraphes qui suivent ont pour but d’énumérer ces différents types de décentralisation en y attachant les définitions élaborées par les différents auteurs.

Selon un auteur dont j’ai perdu les références, il y aurait 3 types de décentralisation : la décentralisation politique, la décentralisation administrative et la décentralisation territoriale. La décentralisation politique est définie comme étant une répartition des pouvoirs législatifs de l’État. Cette répartition doit être officialisée par un document constitutionnel. La décentralisation administrative, ou déconcentration, est définie comme étant la mise en place de structures administratives locales ou régionales subordonnées à une administration centrale et qui reçoivent des mandats ou des missions de celle-ci. La décentralisation territoriale est définie comme étant une variante de la décentralisation administrative. Ce qui la différencie est son aspect politique. Les administrateurs de ces organismes sont élus. Leurs missions sont déterminées par eux-mêmes alors que leurs pouvoirs sont définis par l’administration centrale plutôt que par une constitution comme c’est le cas pour la décentralisation politique. Il s’agit, comme pour la décentralisation administrative, d’une délégation de pouvoirs.

Selon Jacques Baguenard (1980), la décentralisation de pouvoirs suppose l’existence d’“organes locaux” qui ont la maîtrise juridique de leurs activités, c’est-à-dire qu’ils sont libres de prendre les décisions qu’ils veulent dans le respect des lois et règlements et sans être soumis à aucune volonté du pouvoir central. Il pose trois conditions pour sa réalisation.

D’abord, la décentralisation implique la détermination de compétences spécifiques dont bénéficieront les collectivités locales. C’est la reconnaissance d’une “catégorie” d’affaires locales qui sont différentes des affaires nationales. Ensuite, comme deuxième condition, elle implique que les activités propres à ces collectivités locales soient prises en charge par des autorités locales qui sont indépendantes du pouvoir central tant pour la nomination de leurs dirigeants que pour leur révocation. Enfin, comme troisième condition, elle implique que les autorités locales puissent gérer leurs affaires propres de façon autonome.

Dans Introduction à l’administration publique : une approche politique (Gow, Barette, Dion et Fortmann, 1987), les auteurs définissent la décentralisation comme étant un processus qui consiste à «transférer des fonctions, des pouvoirs et des responsabilités de l’administration centrale vers une administration autonome et distincte». L’autonomie, qui caractérise une administration décentralisée, repose sur plusieurs conditions. D’abord, l’administration décentralisée doit avoir une personnalité juridique propre. Ensuite, elle doit disposer d’une autorité décisionnelle. De plus elle doit avoir la capacité d’organiser l’exécution de sa mission et d’en assurer la gestion. Enfin, elle doit avoir le pouvoir de déterminer ses propres politiques et de disposer comme elle l’entend de ses propres ressources. Bien sûr, l’administration décentralisée doit respecter les limites du mandat qui lui a été attribué. En somme, selon les auteurs, il s’agit d’une délégation d’autorité et d’un transfert de responsabilités à un organisme administratif subalterne mais autonome.

Cette délégation d’autorité peut se faire, toujours selon les auteurs, sous deux formes différentes. La première forme est la décentralisation technique ou fonctionnelle. C’est lorsque l’autorité centrale confie certaines missions spéciales à des organismes autonomes telles les sociétés d’État. La deuxième forme est la décentralisation territoriale ou géographique. C’est lorsque des pouvoirs et des responsabilités sont attribués par l’administration centrale à une autorité décentralisée subalterne mais autonome dont les limites territoriales ont été déterminées par cette même administration centrale.

Charles Debbash, qui signe l’article sur la décentralisation dans Encyclopedia Universalis, définie celle-ci comme étant «la gestion par les administrés des affaires qui les concernent le plus directement» en permettant de les associés aux prises de décisions. Il dénombre deux types de décentralisation: la décentralisation territoriale et la décentralisation technique.

La décentralisation territoriale, selon Debbash, implique des collectivités territoriales où les “affaires locales” sont gérées par les citoyens qui vivent sur ces territoires. Cela suppose l’existence d’une communauté d’intérêts entre les habitants de chaque territoire. Elle implique aussi une certaine autogestion locale. Selon l’auteur, il existe plusieurs critères pour mesurer l’étendue de la décentralisation : le volume des affaires locales reconnues, le mode de désignation des responsables locaux et le pouvoir reconnu à ces responsables. Mais, selon lui, tous ces éléments relèvent plus de considérations politiques qu’administratives, puisque ce type de décentralisation est lié au libéralisme.

La décentralisation technique, toujours selon Debbash, c’est lorsqu’un service déterminé détaché de l’État est conféré à un établissement public. Ce type de décentralisation relève des mêmes moyens juridiques et suppose de l’existence d’affaires spécialisées. C’est en quelque sorte un démembrement de l’administration centrale, ce qui suppose, toujours selon l’auteur, un contrôle de tutelle de la part de cette dernière. Cela fait penser aux sociétés d’État que l’on connait ici.

Ce qui différencie la décentralisation territoriale de la décentralisation technique est, selon Debbash, que la première répond à des aspirations politiques alors que la seconde répond à un souci d'efficience. En effet, la décentralisation territoriale consiste en une répartition des affaires administratives qui est demandée par la diversité sociale alors que la décentralisation technique répond aux exigences d’une répartition “harmonieuse” des fonctions administratives entre les différentes branches de l’État.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Article très explicite, merci à l'auteur, brao .


De otmane Laazouzi

Yraya Liz a dit...

Excellente explication, vous pourriez élargir avec des exemples.
Comme je peux l'identifier s'il ya déconcentration technique et/ou territorial par exemple dans le service de ressources humaines de la CSMB, le consulat du canada à Paris, Post Canada en Manitoba??

Merci Beaucoup